Les programmes-cadre de l’UE pour la recherche et l’innovation (PCRI) sont les principaux instruments de l'Union européenne (UE) pour la mise en œuvre de sa politique communautaire dans les domaines des sciences et des technologies. Leur origine remonte jusque dans les années 50.
Avec «Horizon Europe», la neuvième génération de programme a été lancée début 2021. Non seulement le budget destiné aux PCRI a constamment augmenté au fil des années mais l'orientation du contenu des programmes a elle aussi évolué en fonction des besoins politiques de l'UE. Les considérations ci-après donnent un aperçu du développement des programmes de l’UE, de leur lancement à nos jours.
Les programmes-cadres de l’UE pour la recherche et l’innovation (PCRI) sont une réussite des politiques de l'Union européenne. Ils proviennent de deux origines majeures. En 1957, le Centre commun de recherche est mis en place dans le cadre du traité Euratom (essentiellement fission nucléaire). Il comporte un aspect recherche. En 1983, le programme ESPRIT, actif dans l'informatique et les télécommunications, est proposé par le président français Mitterrand.
Le 25 juillet 1983, une résolution du Conseil européen, institue des «Programmes-cadres pour des activités de recherche et de développement et de démonstration» (Résolution du Conseil relative à des programmes-cadres pour des activités communautaires de re-cherche, de développement et de démonstration, et au premier programme-cadre 1984-1987, 31983Y0804(01), adoptée le 25 juillet 1983, JO du 4 août 2003, p. 1, entrée en vigueur le 1984, abrogée le 31 décembre 1987. Une résolution est une décision en langage européen.). L'année qui suit, en 1984, le premier programme-cadre est mis en place.
Le but de ces programmes vise à promouvoir un développement scientifique et technique équilibré en Europe. Le PCR définit les objectifs scientifiques et techniques à réaliser ainsi que les critères de sélection pour les actions, les priorités relatives et les indications financières. C'est un instrument au service de la construction d'une recherche communautaire plus intégrée. Selon la résolution du Conseil, des actions de recherche peuvent être justifiées si ces actions présentent des avantages par rapport à des activités nationales. C'est le principe de subsidiarité. Les programmes-cadres de l’UE sont élaborés par la Commission européenne qui présente une proposition en consultation avec les États-membres.
Figures et principes de base des programmes-cadres de l’UE pour la recherche et l’innovation

Figure 1: Budget annuel des programme-cadres (en milliards d’euros, en prix courants)

Figure 2: La ventilation et l’évolution au fil du temps des budgets (en milliards d’euros) alloués aux différentes priorités thématiques des programme-cadres
Quelques principes de base
- La Commission européenne ne mène pas elle-même de projets de recherche et d’innovation et n'y participe pas (excepté via son Centre commun de recherche), mais elle apporte un soutien financier aux recherches ou travaux décrits.
- En général, les propositions de projets doivent être soumises en réponse à un appel de propositions.
- Le contenu du projet doit correspondre aux objectifs exposés dans l'un des volets du programme-cadre, tandis que les partenaires impliqués doivent satisfaire à tous les critères d'éligibilité et leur proposition doit répondre aux exigences scientifiques, thématiques et formelles de l'appel.
- Les propositions reçues en réponse à un appel qui satisfont les exigences susmentionnées sont évaluées par un groupe d'experts indépendants des différents domaines concernés.
- Les projets sont sélectionnés uniquement en fonction de leur qualité, mesurée selon des critères spécifiques comme la qualité technique et scientifique et à condition qu'ils soient conformes aux objectifs de l'appel tout en restant dans les limites budgétaires fixées. Il n'existe pas de quotas nationaux.
Les programmes-cadres de l’UE pour la recherche et l’innovation (PCRI)
1er PCRI (1984–1987)
Doté d'une enveloppe de 3,3 milliards d'euros (ECU à l'époque), il comprend le domaine énergie (avec une grande part de fission nucléaire) qui compte pour 50% du budget, les technologies de l'information et des communications dites «TIC» (25%), l'industrie et les matériaux (11%), les sciences de la vie et l'environnement (10%). La mobilité et les bourses complètent ce budget. Le 1er janvier 1988, le premier projet PCRI avec participation suisse (École polytechnique fédérale de Lausanne, EPFL) est lancé.
2e PCRI (1987–1991)
Avec l'Acte unique européen en 1987, la science devient pour la première fois une responsabilité communautaire. La même année, débute le 2e PCRI. Les domaines de recherche changent considérablement. Les TIC se taillent 40% du budget global s'élevant à 5,4 milliards d’euros (ECU à l'époque), au détriment de l'énergie qui passe à 20%. L'industrie et les matériaux doublent presque leur part, tandis que l'on voit l'apparition de nouveaux programmes spécifiques, comme le soutien aux PME et à la coopération internationale.
3e PCRI (1990–1994)
Le 3e PCRI comporte une enveloppe de 6,6 milliards d’euros (ECU à l'époque). Les TIC sont toujours le plus gros domaine de recherche, mais ils baissent relativement de 5 points comparé au 2e PCRI. L'énergie poursuit également sa décroissance tandis que les sciences de la vie (santé et alimentation) augmentent leur part relative. Le 3e PCRI est toujours orienté sur les sciences exactes et naturelles et est subdivisé en quatre programmes thématiques : Technologies Diffusantes (TIC et industrie et matériaux) ; Gestion des Ressources Naturelles (environnement, énergie et sciences de vie) ; Gestion des Ressources Intellectuelles (bourses et mobilité) ; Actions Centralisées pour la Diffusion et l'Exploitation des Connaissances Issues des Programmes Spécifiques.
En Suisse, pendant cette période, la responsabilité du programme-cadre passe de l'Office de la formation professionnelle et de la technologie (OFFT, qui incluait à l'époque la Commission pour la technologie et l'innovation) à l'Office fédéral de la formation et de la science (OFES). En fait, il s'agit d'un échange. En contrepartie, le Conseil fédéral confie la responsabilité du programme Eureka à l'OFFT, sensément plus proche des entreprises. Les deux offices seront réunis en 2013 dans l'actuel SEFRI.
4e PCRI (1994–1998)
Le 4e PCRI induit un saut quantitatif et qualitatif très important par rapport à son prédécesseur. Il double presque puisque le montant total de son budget passe de 6,6 (3e PCRI) à 13,1 milliards d’euros (ECU à l'époque). À côté des domaines de recherche (Information et télécommunication, Industrie, Environnement, Sciences de la vie, Energie et transport), qui représentent 87% du budget, se trouvent trois programmes horizontaux : coopération internationale, diffusion et valorisation des résultats ainsi que stimulation de la formation et de la mobilité des chercheurs. Jusqu'au 4e PCRI, les participants à un projet recevaient un montant à peu près égal, sauf le coordinateur qui se voyait confier un montant moyen de 10 à 15% supérieur aux autres. Innovation : tous les programmes spécifiques sont lancés en même temps (ce qui n'était pas le cas avant).
5e PCRI (1998–2002)
Le 5e PCRI change peu par rapport à son prédécesseur. Thématiquement, il se réduit à quatre programmes, les trois programmes horizontaux restant mais étant appelés différemment. Son budget est relativement proche : 14,9 milliards d’euros (ECU à l'époque). En cours de programme, certains projets commencent à être très gros. Quelques-uns dépassent même les 80 partenaires. Par contre, les projets peuvent être très déséquilibrés, dans la mesure où certains partenaires ont des tâches beaucoup plus importantes que d'autres et ont un budget très supérieur aux autres partenaires.
Le 5e PCRI renonce à un critère socio-économique pour l'obtention d'un financement. Auparavant, la Commission accordait une attention particulière à la présence de partenaires des régions européennes moins avancées dans les projets européens.
La Suisse commence à atteindre un retour financier proche de l'équilibre à la fin de cette période.
6e PCRI (2002–2006)
Le 6e PCRI est doté d'un budget de 19,1 milliards d'euros. Il est structuré différemment du 5e. Une grande partie du budget porte toujours sur les programmes thématiques comme les technologies d'information, la santé, le développement durable, les transports. etc. Les activités horizontales sont destinées à structurer l'Espace européen de la recherche (cette appellation est utilisée pour la première fois). Euratom fait partie des grandes activités et est un chapitre à part.
Globalement, on note un affinement des thématiques. Pour la première fois, la recherche fondamentale occupe un domaine à soi. Deux instruments font aussi leur apparition explicitement. Tout d'abord, les projets intégrés sont de vastes projets réunissant de nombreux groupes de recherche et peuvent obtenir un budget global jusqu'à 30 millions d'euros. Ensuite, les réseaux d'excellence sont aussi fort bien dotés financièrement. Les deux activités visent à intégrer durablement les capacités de recherche des partenaires autour d'un programme commun d'activité.
Pendant ce programme-cadre, en 2004, la Suisse est associée aux PCRI dans le cadre des accords bilatéraux. Les chercheurs en Suisse peuvent enfin diriger des projets, ils ont accès à tous les résultats et la Suisse peut contribuer à l'élaboration des programmes de travail annuels. Les chercheurs sont payés directement par la Commission européenne et non plus par la Confédération.
7e PCRI (2007–2013)
Le 7e PCRI change considérablement la donne. Il s'inscrit sur une période calendaire de sept ans et est couplé avec les perspectives financières et donc avec la planification globale du budget de l'UE. De plus, son budget s'élève à 55,6 milliards d'euros, soit une augmentation réelle de 70% par rapport à son prédécesseur (en tenant compte de la durée). Cette augmentation reflète l'importance de la recherche dans la stratégie de Lisbonne, qui vise à faire de l'Europe l'économie de la connaissance la plus compétitive et la plus dynamique au monde. La part du budget accordée aux programmes thématiques baisse quelque peu, au profit notamment de la recherche fondamentale et de la fusion pour la construction du Réacteur thermonucléaire expérimental international (ITER)
Du côté des instruments, une des tendances de ce PCRI est la volonté affirmée et explicite de la Commission européenne d'intégrer la recherche des États-membres et associés et de l'économie privée dans un Espace européen de la recherche. La Commission européenne pousse de plus en plus au financement conjoint de projetsnotamment avec les institutions publiques des pays membres, comme pour les ERA-NETs et ERA-NETs+ (Réseaux de l'Espace européen de recherche), des actions de coopération au niveau européen entre des programmes de financement nationaux visant à construire un programme transnational pérenne pour le soutien de projets de recherche et développement et les initiatives de programmation conjointe (JPI). Ces actions consistent à définir et à mettre en œuvre de manière coordonnée au niveau européen des programmes de recherche sur des enjeux majeurs pour la société européenne, la science et la technologie étant des domaines largement ouverts. Avec l'économie privée, de nouveaux instruments sont créés, les plateformes technologiques européennes (ETP) se transforment en Initiatives technologiques conjointes (JTI). De là, la Commission peut mettre en place des partenariats publics/privés qui impliquent l'industrie, les chercheurs et les pouvoirs publics des États-membres et associés.
8e PCRI «Horizon 2020» (2014–2020)
Le 8e programme-cadre de l’UE pour la recherche et l'innovation, appelé Horizon 2020 poursuit l'orientation du 7e PCRI vers l'intégration de la recherche européenne. Il est doté d'un budget de 82 milliards d'euros. La part du budget pour les programmes thématiques régresse un peu, puisqu'elle passe de 62% dans le 7e PCRI à 54% dans le 8e, au profit, notamment de la recherche fondamentale (de 14% à 16%) et du nouveau programme Accès au capital risque (3.7%). On note aussi la création de l'Institut européen de l'innovation et de la technologie (EIT), une sorte de MIT européen.
Point de vue instruments, les projets intégrés et réseaux d'excellence ont été abandonnés lors du 7e PCRI, mais les premiers font des émules dans Horizon 2020. La Commission européenne met en effet en place deux immenses projets, des initiatives phares sur les technologies futures et émergentes (FET-Flagship), dotées d'un demi-milliard de francs sur dix ans que les participants doivent compléter d'un même montant (il peut s'agir de fonds provenant des États membres et associés et/ou du secteur privé). La Commission peut aussi participer aux Initiatives de Partenariats public-public (P2P) de plusieurs États-membres. Les initiatives de programmation conjointe (JPI) devraient être aussi appliquées plus largement.
Nouveauté : les Communautés de connaissance et d'innovation (KIC), des instruments de l'Institut européen d'innovation et de technologie (EIT). Ils ont été créés pour renforcer la coopération entre les instituts de recherche, les hautes écoles et l'industrie. Une des caractéristiques majeuers d'Horizon 2020 est de plus intégrer la dimension de l'innovation dans les programmes-cadres. Une autre nouveauté est l'accès facilité au capital-risque. La Commission a en effet remarqué qu'entre la recherche et l'application sur le marché, il y avait parfois un trou béant et elle veut le combler avec des prêts à taux plus ou moins garantis.
9e PCRI «Horizon Europe» (2021–2027)
Baptisé Horizon Europe, le 9e programme-cadre de l’UE pour la recherche l’innovation court de 2021 à 2027. Avec un budget de 95,5 milliards d’euros, Horizon Europe est le plus ambitieux programme d’encouragement de la recherche et de l’innovation conçu par l’Union européenne à ce jour.
L’excellence scientifique continuera d’y être soutenue par le Conseil européen de la recherche (European Research Council; ERC) et par les bourses des actions Marie Skłodowska-Curie (Marie Skłodowska-Curie Actions; MSCA). La compétitivité industrielle et la capacité d’innovation de l’Europe seront renforcées par l’innovation fondée sur la science dans des domaines de recherche thématiques, par le Conseil européen de l’innovation (European Innovation Council; EIC) et par l’Institut européen d’innovation et de technologie (European Institute of Innovation and Technology; EIT).
Le nouveau programme-cadre pour la recherche et l’innovation vise à accélérer les avancées scientifiques et technologiques dans l’UE par un accroissement des investissements dans le personnel hautement qualifié et la recherche de pointe. En même temps, Horizon Europe contribuera aussi à soutenir les priorités stratégiques de l’UE, dont font entre autres partie: la création d’une société européenne plus résiliente, plus inclusive et plus démocratique, prête à réagir aux menaces et aux désastres; la restauration et la préservation de la biodiversité et des écosystèmes européens en tant que conditions cruciales pour garantir la sécurité alimentaire ainsi qu’un environnement propre et sain. Dans le même ordre d’idées, Horizon Europe doit aussi contribuer aux transitions numérique et écologique et renforcer l’Espace européen de la recherche (European Research Area; ERA). La conception d’Horizon Europe tient également compte des objectifs de développement durable des Nations Unies (Sustainable Development Goals; SDGs).
Informations complémentaires
Archives
Accord (PDF, 541 kB, 29.01.2015)de coopération scientifique et technologique entre l'Union européenne et la Communauté européenne de l'énergie atomique et la Confédération suisse associant la Confédération suisse au programme-cadre pour la recherche et l'innovation Horizon 2020 et au programme de recherche et de formation de la Communauté européenne de l'énergie atomique complétant le programme- cadre Horizon 2020, et réglementant la participation de la Confédération suisse aux activités d'ITER menées par Fusion for Energy
Effets de la participation de la Suisse au 7e programme-cadre de recherche européen (PDF, 9 MB, 10.09.2014)Rapport 2014, SEFRI
Participation de la Suisse au 7e programme-cadre européen de recherche (PDF, 2 MB, 04.06.2013)Bilan intermédiaire 2007–2012 – Faits et chiffres
Effets de la participation suisse aux programmes-cadres européens de recherche (PDF, 1 MB, 15.10.2010)Rapport intermédiaire 2009
La participation suisse au 6ème Programme-cadre européen de recherche (PDF, 1 MB, 18.12.2012)Faits et chiffres 2008, SEFRI